L’Art d’enseigner à parler aux sourds-muets de naissance

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Le plus beau privilège de l’homme, c’est sans doute de pouvoir communiquer ses pensées et ses sentiments. Cette faculté par laquelle les esprits se touchent et les cœurs se confondent, fut le premier comme elle est le plus doux nœud de la société. Nos jouissances perdraient tout leur prix, et bientôt suivrait le dégoût, si nous ne trouvions un attrait toujours plus vif à faire passer dans le sein d’un ami les émotions qui nous agitent. Le plaisir partagé est plus doux, la peine plus légère. Les larmes de la pitié coulent au cœur du malheureux, comme un baume qui en cicatrise les plaies, et elles ne sont pas sans charmes pour celui qui les répand. Ce commerce des âmes est pour nous plus qu’un plaisir ; c’est un besoin. Brisez ce lien qui attache l’homme à l’homme, et sa vie n’est plus un présent du ciel ; c’est un fardeau dont toutes ses forces pourront à peine soutenir le poids. Sans souvenir, comme sans espérance, son existence, qui ne se rattache ni au passé ni à l’avenir, s’arrête pour ainsi dire au besoin du moment, et ne se fait plus sentir que par l’ennui ou la douleur.

Tel et plus déplorable encore était l’état des sourds-muets, avant que la charité, fille du ciel, eût renversé la barrière que la privation d’un sens avait élevée entre ces malheureux et le reste des hommes.

Un préjugé aussi absurde qu’il est humiliant pour l’espèce humaine, représentait le sourd-muet comme une sorte d’automate, sensible aux impressions physiques, mais dont aucune étincelle de raison n’éclairait l’esprit, dont aucun sentiment n’échauffait le cœur. Étranger au sein même de sa famille, cet enfant délaissé du ciel et des hommes, était relégué, par l’amour-propre de ses parents, loin de la société où il n’inspirait qu’une pitié humiliante ! Vainement brillait dans tous ses traits son âme tendre et expansive ; aucune autre âme ne s’ouvrait à ses effusions. Son esprit curieux cherchait partout la lumière, et partout ne rencontrait qu’un voile impénétrable, qu’aucune main ne tentait de soulever. Lorsqu’autour de lui tout respirait le bonheur, le malheureux n’avait en partage que de vains désirs et des regrets superflus. Tous les sentiments les plus vifs, refoulés dans son sein, allumaient ses yeux d’un feu sombre, qui, imprimant à son aspect une sorte d’effroi, achevait de lui fermer les cœurs, et faisait taire à son égard tous les sentiments, jusqu’à la tendresse maternelle. On le regardait presque comme un être d’une espèce différente. Il restait confondu avec les insensés ; d’autant plus à plaindre, qu’il sentait toute l’horreur de son sort.

On rencontrait alors peu de sourds-muets ; et il semble que le nombre de ces infortunés se soit accru depuis que leur sort s’est amélioré. Une philosophie chagrine ne manquerait pas d’en trouver la cause, dans la dépravation des mœurs toujours croissante, dirait-on, et qui, corrompant, à sa source même, le principe de la vie, fait porter aux enfants la peine de l’inconduite de leurs parents. Mais il s’en faut qu’une cause si déplorable ait réellement exercé cette funeste influence ; il est même douteux que le nombre des sourds-muets soit aujourd’hui beaucoup plus grand que par le passé. Mais depuis que les succès obtenus dans leur éducation ont prouvé qu’ils ne diffèrent des autres hommes que par les préjugés qu’ils n’ont point, et dont notre enfance est imbue, les parents n’ont plus rougi de leur avoir donné le jour, et les sourds-muets ont paru sans honte, et même avec quel qu’honneur, dans la société, pour partager les jouissances qu’elle offre et les charges qu’elle impose.

Ainsi l’art d’instruire les sourds-muets, qui achève l’œuvre imparfaite du Créateur, réhabilite dans toute la dignité de l’homme ces infortunés que l’opinion plaçait en quelque sorte au-dessous de la brute, et rend à la religion et à la société tant d’êtres qui semblaient pour toujours condamnés à ignorer les consolations de l’une et les douceurs de l’autre ; cet art si touchant dans son but, si brillant dans ses résultats, ne fait pas seulement le bonheur de ceux qu’elle éclaire du flambeau de l’instruction ; ses effets bienfaisants se sont étendus sur tous les sourds-muets, en arrachant à la proscription la plus injuste, cette classe intéressante par son infirmité, et le plus ordinairement aussi par la réunion de toutes les qualités du cœur, comme si la nature eût voulu réparer ou compenser par-là un oubli trop cruel.

Le plus beau privilège de l’homme, c’est sans doute de pouvoir communiquer ses pensées et ses sentiments. Cette faculté par laquelle les esprits se touchent et les cœurs se confondent, fut le premier comme elle est le plus doux nœud de la société. Nos jouissances perdraient tout leur prix, et bientôt suivrait le dégoût, si nous ne trouvions un attrait toujours plus vif à faire passer dans le sein d’un ami les émotions qui nous agitent. Le plaisir partagé est plus doux, la peine plus légère. Les larmes de la pitié coulent au cœur du malheureux, comme un baume qui en cicatrise les plaies, et elles ne sont pas sans charmes pour celui qui les répand. Ce commerce des âmes est pour nous plus qu’un plaisir ; c’est un besoin. Brisez ce lien qui attache l’homme à l’homme, et sa vie n’est plus un présent du ciel ; c’est un fardeau dont toutes ses forces pourront à peine soutenir le poids. Sans souvenir, comme sans espérance, son existence, qui ne se rattache ni au passé ni à l’avenir, s’arrête pour ainsi dire au besoin du moment, et ne se fait plus sentir que par l’ennui ou la douleur.

Tel et plus déplorable encore était l’état des sourds-muets, avant que la charité, fille du ciel, eût renversé la barrière que la privation d’un sens avait élevée entre ces malheureux et le reste des hommes.

Un préjugé aussi absurde qu’il est humiliant pour l’espèce humaine, représentait le sourd-muet comme une sorte d’automate, sensible aux impressions physiques, mais dont aucune étincelle de raison n’éclairait l’esprit, dont aucun sentiment n’échauffait le cœur. Étranger au sein même de sa famille, cet enfant délaissé du ciel et des hommes, était relégué, par l’amour-propre de ses parents, loin de la société où il n’inspirait qu’une pitié humiliante ! Vainement brillait dans tous ses traits son âme tendre et expansive ; aucune autre âme ne s’ouvrait à ses effusions. Son esprit curieux cherchait partout la lumière, et partout ne rencontrait qu’un voile impénétrable, qu’aucune main ne tentait de soulever. Lorsqu’autour de lui tout respirait le bonheur, le malheureux n’avait en partage que de vains désirs et des regrets superflus. Tous les sentiments les plus vifs, refoulés dans son sein, allumaient ses yeux d’un feu sombre, qui, imprimant à son aspect une sorte d’effroi, achevait de lui fermer les cœurs, et faisait taire à son égard tous les sentiments, jusqu’à la tendresse maternelle. On le regardait presque comme un être d’une espèce différente. Il restait confondu avec les insensés ; d’autant plus à plaindre, qu’il sentait toute l’horreur de son sort.

On rencontrait alors peu de sourds-muets ; et il semble que le nombre de ces infortunés se soit accru depuis que leur sort s’est amélioré. Une philosophie chagrine ne manquerait pas d’en trouver la cause, dans la dépravation des mœurs toujours croissante, dirait-on, et qui, corrompant, à sa source même, le principe de la vie, fait porter aux enfants la peine de l’inconduite de leurs parents. Mais il s’en faut qu’une cause si déplorable ait réellement exercé cette funeste influence ; il est même douteux que le nombre des sourds-muets soit aujourd’hui beaucoup plus grand que par le passé. Mais depuis que les succès obtenus dans leur éducation ont prouvé qu’ils ne diffèrent des autres hommes que par les préjugés qu’ils n’ont point, et dont notre enfance est imbue, les parents n’ont plus rougi de leur avoir donné le jour, et les sourds-muets ont paru sans honte, et même avec quel qu’honneur, dans la société, pour partager les jouissances qu’elle offre et les charges qu’elle impose.

Ainsi l’art d’instruire les sourds-muets, qui achève l’œuvre imparfaite du Créateur, réhabilite dans toute la dignité de l’homme ces infortunés que l’opinion plaçait en quelque sorte au-dessous de la brute, et rend à la religion et à la société tant d’êtres qui semblaient pour toujours condamnés à ignorer les consolations de l’une et les douceurs de l’autre ; cet art si touchant dans son but, si brillant dans ses résultats, ne fait pas seulement le bonheur de ceux qu’elle éclaire du flambeau de l’instruction ; ses effets bienfaisants se sont étendus sur tous les sourds-muets, en arrachant à la proscription la plus injuste, cette classe intéressante par son infirmité, et le plus ordinairement aussi par la réunion de toutes les qualités du cœur, comme si la nature eût voulu réparer ou compenser par-là un oubli trop cruel.

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